Il est minuit deux.
Juste avant il était minuit un.
Moi qui avait prévu de commencer mon écrit par « Il est 00:01 », pour la figure de style, je ne sais pas. Peut-être parce que c’est la première minute de demain…
C’est l’inertie au démarrage de mon ordinateur qui m’a cassé l’ambiance. Taper un code, attendre qu’il se relance, que le processeur traite toutes les informations qui saturent sa mémoire, son énergie, sa disponibilité. C’est moi qui ai du m’adapter à lui, et attendre sa latence pour pouvoir déverser mes pensées, ma créativité scripturale.
J’ai recommencé à avoir l’envie d’écrire ces derniers temps. Enfin l’envie, en soi je l’avais souvent, mais c’est de prendre le temps qui est un sacré point qui demande travail. Pourquoi prendre le temps pour quelque chose et pas pour autre chose ? Certainement l’intérêt que l’on porte à la chose. L’importance que l’on lui donne à un certains moment, ou alors plutôt d’arrêter de contrôler tout acte, et laisser couler.
Peut-être aussi qu’a travers divers indices de mes derniers jours, j’ai été incité à rependre l’écriture. On m’a conforté, rendu en partie confiance en moi, en l’intérêt que cela peut avoir. Ou encore la dynamique globale du moment. Mettre une grosse veste en été n’aurait pas nécessairement d’intérêt, tandis qu’en hiver oui. Peut-être que je fais juste la bonne chose au bon moment de ma vie, naturellement.
Nous venons de raccrocher avec Louisa. On se parle de temps en temps par téléphone. C’est souvent elle qui m’appelle, mais je ne crois pas qu’elle ait la sensation que ce soit à sens unique. C’est juste comme ça pour le moment et assez équilibré en fait.
On prend le temps de se parler, naturellement. On y prend du plaisir, simple, je crois. On parle de la vie, de nos projets, de nos avancées, de nos questionnements. Je pense qu’en parler, permet de se sortir un peu de soi, prendre du recul, simplement, et le partager, c’est agréable. Que quelqu’un d’autre le sache, suive, si intéresse, nous y fasse réfléchir…?
Elle se couchait. Nous avons coupé sur un « Bonne nuit et fais de beaux rêves », à peu prêt.
Juste avant ça, elle m’écoutait. Je parlais dans le combiné silencieux. Je laissais couler ce qui me passait par les sentiments à ce moment là. Je suis parti du fait qu’une amie m’avait fait la remarque que
« T’as encore un corps d’enfant, qu’est ce qui s’est passé ? »,
pour en arriver à un état de société.
Si la remarque est vrai, que j’ai encore un « corps d’enfant », ce que je pense vraisemblable, j’y vois plusieurs raisons possibles:
Vers mes 17 ans, j’ai pris du Roacutane pendant un bon moment. Ca m’a fait mal aux articulations. Pas de perte de cheveux, ni d’autre désagrément réel je crois. J’avais juste mal aux genoux en courant en sport. Je n’en ai pas trop parlé, j’ai accepté. Difficile de faire consciemment le lien pour moi à cet époque-ci. Il parait que ça peut influencer plein de choses cette merde. Faut dire que j’avais le visage couvert de boutons. Facile d’en parler aujourd’hui, mais sur le moment c’était pas top. Pourtant je ne crois pas que ça m’ait réellement frustré…
Peut-être aussi, cette absence de mémoire de frustration, mais aussi ce blocage « plus jeune », parce que vers mes 15 ans j’ai eu un traumatisme crânien. Tombé face contre terre en faisant des sauts en BMX. Un ostéopathe une fois m’avait dit
« Tu as eu un fort accident dans ta jeunesse » en me mettant les mains sur le crâne…
« Heu, oui.. »
« T’as fait un beau vol plané, en vélo ? »
« Oui, en BMX ».
Plus rien ne m’étonne de la part des ostéopathes. Enfin, c’est lui qui m’avait dit qu’un fort traumatisme peut bloquer une certaine partie psychologique à l’époque où le fait a eu lieu. C’est aussi lui qui m’avait dit « Bon voyage » en sortant. Il pensait m’avoir bien débloqué, je crois que ce n’était pas encore ça…
Peut-être enfin, et c’est ce dernier point qui m’intéresse, que je n’avais pas envie de vieillir.
Qu’est-ce qui donnerait envie d’appartenir au « monde des adultes », s’il en est vraiment un ? Moi je pense déjà qu’il n’y a pas « d’Adulte ». Il y a de jeunes êtres humains qui prennent en âge, et en expérience, de manière évolutive. On n’est pas adulte le lendemain de son anniversaire des 18 ans.
Enfin, quant à ce monde d’adultes… à part avoir le droit de conduire une moto, partir en voyage librement à l’autre bout du monde, rencontrer des femmes et vivre des histoires de vie avec, avoir une chambre et un fonctionnement à soi, faire des choses cools… pourquoi avoir envie de passer dans ce « monde d’adultes » ? S’accomplir ?
Encore plus aujourd’hui, voilà comment ça me venait:
Comment on peut, jeune aujourd’hui, alors qu’on nous dit qu’il faut être un bon élève à l’école, qu’il faut étudier encore pour les 10 années à venir, dans une monotonie qu’on nous impose, soumis au cadre « des adultes »,
Comment on peut, en écoutant la radio et en entendant que le potentiel futur président aurait fait profiter sa famille des sous de l’état et continue de démentir alors que ça se précise de plus en plus, et qu’on ne peut avoir confiance en la parole de personne apparemment,
Comment on peut, en entendant que ce bon vieux Mr Dassault, à ses 91 ans est sauvé de la prison par son âge avancé, alors qu’il aurait caché des millions au fisc français…Ce brave Monsieur Dassault dont on m’a dit à la même radio depuis que je suis petit:
« C’est cool, la France va vendre des avions, slash, Hélicoptères, slash, je ne sais quoi à je ne sais quel pays pour qu’il puisse prétendre faire la guerre lui aussi » suivi d’un
« C’est cool ça va créer des emplois, du dynamisme, ça va faire entrer des sous, du PIB, des taxes… »
Alors que ce même monsieur, de sa génération, qui avait 30 ans en sortie de guerre et a pu tenir les rennes durant les 30 glorieuses, ce Monsieur de cette génération qui a vu établir pas mal des acquis sociaux fondamentaux de notre société actuelle, celui-la même a caché des sous à tous ses potos !
Si je vivais dans une plus petite société de personnes, et qu’on était 10 incluant Serge, là on lui dirait:
« Vieux, t’as merdé. On t’a fait confiance et tu nous a pris pour des imbéciles, maintenant soit tu te rachète et tu n’es même pas sur qu’on te pardonne avant ta mort, soit tu peut t’exiler au loin, tant pis, on fera sans toi. On va revoir nos priorités, et c’est bien dommage, mais comment t’as pu nous mentir pendant tant de temps ? »
Aujourd’hui l’argent rachète la faute, mais l’honneur, on n’en parle plus. Pas un journaliste qui prenne partie et commente que son honneur est mort avant sa fin à lui.
Pour reprendre le fil, comment voulez-vous, en entendant que même celui qui faisait la chasse à la fraude fiscale, en a fait une, comment voulez-vous avoir confiance ?
Avoir confiance non seulement en ceux qui nous gouvernent, mais également en ce que « le cadre » nous conseille. Ce cadre sociétal qui nous dit de faire de longue études pour être tranquile plus tard, alors qu’on voit que même ceux qui ont fait ce pari avant nous en reviennent et partent se chercher à l’autre bout du monde. Avoir envie d’étudier et travailler en filant droit alors qu’on voit que ceux qui le font galèrent une bonne partie de leur vie…si ce n’est tout au long, pour avoir été crédule, empathique, généreux…
Comment avoir envie de suivre un chemin dicté quand on n’a rien qui nous donne envie d’avoir confiance ? Ou est l’honneur, où sont les valeurs, où est l’étique, où sont les personnages de film qui gagnent tout le temps à la fin parce qu’il ont été droit dans leurs bottes ?
Où est la place de l’utopie, des rêves d’enfants, de l’insouciance, des bons moments ? Asphyxié par une nécessité de survivre pour faire tourner la roue…
Mon état d’esprit, certainement s’entend partiellement au ton des ces écrits… C’est juste un dégout depuis longtemps, que petit on ne s’autorise pas forcément à accepter. On reproduit les fonctionnements d’autres, qui eux doivent savoir.
Mais personne ne sait. Personne n’a raison. Ce qui prévaut c’est le respect de l’autre et de sa liberté. L’acceptation réciproque de fonctionnements d’une société que l’on a pour souhait de faire perdurer, pas d’une société que l’on subit et dont on tire profit.
On a trop eu trop longtemps ? On a perdu la notion des choses… On a poussé un essai jusqu’au bout, jusqu’à ce que ça fuit globalement, on va attendre que ça coule…pour reprendre conscience. En attendant, il y a tout plein de petits Humains qui ne doivent rien y comprendre et vont avoir une drôle de construction d’esprit…

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