Le déconfinement est-il un cadeau empoisonné ? – Responsabilité, Attention, Peur de l’autre et Productivité…

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Alors que cela fait presque 2 mois que nous sommes confinés chez nous, le Jour est enfin arrivé: l’heure du déconfinement. Même mon correcteur orthographique ne sait pas ce que c’est !

Nous voilà libre, enfin presque, de sortir de chez nous sans Attestation de déplacement dérogatoire selon l’arcticle 1 du Décret du 16 Mars, voire 23 Mars 2020 … visant à limiter la propagati… allez j’arrête de vous embêter, je vérifiais moi-même que je le connaissais bien par coeur. Eh oui, c’est marquant de devoir prendre la plûme pour se faire un attestation quand une fois dans la rue on se rend compte qu’on l’a oublié… et c’était vraiment une plûme, mais avec cartouche noire, et c’était vraiment un papier libre…lui !

Et pourtant aujourd’hui je suis resté « au bureau », (enfin l’appartement sous-loué pour l’occasion qui me servait de bureau) pour ne sortir que sur le tard, à 18h.

Mes achats du jour:

A la Mercerie du coin de la rue j’ai acheté de l’élastique blanc que la dame avait reçu Jeudi dernier à 13h, parce que ses 400m précédents avaient filé… (elle est bonne hein) – Vendredi c’était férié alors j’ai bien du attendre – et une doublure coton respirante.

A la Pharmacie j’ai acheté de l’alcool dénaturé/modifié, en échangeant avec la Pharmacienne qui a reprit son visage humain au moment où j’avais réussi à la faire sortir de son rôle, disant que j’aimais l’expérience de fabriquer mon gel désinfectant moi-même : « Ho, vous savez seul ça désinfecte déjà très bien hein » Et non ce n’est pas de moi, c’est d’elle !

Au final ces achats mêmes portent mon propos (c’est pour ça que j’en parle;):

Quand il n’y a pas de cadre, c’est à chacun de prendre soin de lui

Maintenant que nous sommes dehors, c’est à chacun sa responsabilité ! Hé oui. Et si on aurait parfois envie que ça revienne comme tel sur la route pour s’éviter les radars, là on est face au tout! Passer du confinement au « Chacun fait ce qu’il veut », sauf dans les transports, ça va en générer des situations cocasses…

Enfin, cela dit, je ne saurais critiquer le Gouvernement (je vous voyais déjà venir) sur cette décision. C’est plutôt un simple constat:
aujourd’hui, alors que jusqu’alors les consignes étaient claires et que chacun restait chez lui sauf 1h/jour, c’est à chacun de prendre soin de lui. En fait on s’étaient mis en couveuse pendant tous ces jours, et là on doit voler de nos propres ailes. Ce qui parait être une liberté, et un gage de confiance que de nous laisser nous organiser par nous même, est en fait une responsabilité…

Alors oui, on va nous aider, nous distribuer des masques, promulguer des « mesures », voter des « lois », décider des « budgets » et mettre à dispositions des « aides », mais face à la santé, c’est aussi beaucoup « chacun sa responsabilité » (en tout cas en ce qui concerne les désagréments de tomber malade). Et nous revoilà avec mes achats du jour: de quoi me munir de masque et gel hydroalcoolique, car en fait, passé la peur du « début-confinement », c’est surtout maintenant que l’on va en avoir besoin, maintenant que l’on sort tous les jours!

Quand on affronte un risque tout comme une nouveauté, il faut porter ATTENTION

Ah, porter attention. Attention à l’attention ! Car l’attention, c’est une des choses qui nous est comptée. En effet l’attention mobilise le cerveau, et le cerveau mobilise de l’énergie; et l’énergie… ça se quantifie ! (Sinon vous n’aviez qu’à avoir l’habitude)

C’est ce qu’on pourrait appeler une « charge mentale » en fait: devoir porter attention. C’est en me faisant une entorse à la cheville gauche que j’ai compris la leçon: quand on n’a pas tous ses moyens, chaque chose prend plus de temps et d’attention. Car en effet, outre les béquilles, portant son attention sur son membre affaiblit, on a plus de mal à la porter autre part.

Aujourd’hui, cela signifie que lorsque vous voudrez passer une journée « normale » (ou en tout cas anciennement habituelle) tout en prenant en compte la contrainte « Coronavirus », il pourra apparaitre comme « normal » (=acceptable) que vous soyez moins efficace, oubliez votre parapluie, vos clés, perdiez votre porte-feuille, ou tout simplement, soyez beaucoup plus fatigué à la fin de la journée.

« Tous ensemble chez Soi » et dehors l’Autre est une menace…

Durant le confinement, lorsque l’on marchait dans la rue, chacun prenait bien soin de ne pas parler quand on se croisait sur un trottoir. C’était désagréable. Pour ma part j’ai bien eu dit quelques « Bonjour » ou « Merci » une fois passé… Mais aujourd’hui que la densité de population augmente dans la rue…

Comment va-t-on échanger naturellement comme on l’a fait jusqu’ici ? Habitant Marseille, c’est une des pratiques qui m’a fait aimer la ville: le rapport humain à échelle humaine. Et aujourd’hui ? Même lorsque j’ai croisé mon voisin en bas de l’immeuble, je ne comprenais pas ce qu’il me disait dans son masque. Il a été obligé de le baisser, à au moins 1m d’écart…

Et si je me retrouve avec quelqu’un sans masque ou qui respecte peu les distances, comment aborder le sujet alors que j’avais déjà peut-être du mal à le faire avant la « crise »..?

Ma soeur qui travaille en magasin, redoute finalement des incivilités provoquées par ces distances, ces files d’attentes, ces temps plus longs, ces peurs, et aussi notre irrémédiable tendance à vouloir tirer la couverture à nous quand on a peur d’en manquer…

Maintenant que l’on redevient une société « libérée » (relativement) on est en droit d’attendre que chacun soit de nouveau « productif »

Eh oui, c’est là toute la manoeuvre gouvernementale: maintenant que vous n’avez plus d’obligation à résidence, et que vos enfants peuvent aller à l’école, vous n’avez plus de « bonne raison » d’être « imparfaitement productif ». Moi j’aime bien ça l’imparfait, j’ai une marque basée sur cette idée, mais la société de consommation elle, aime moins…sauf si on bâtit tout un discours de valeurs autour.
Durant le confinement, chacun chez soi, on a pu découvrir l’intérieur imparfait des habitations des autres durant des visio-conférences, les cris des enfants derrière, l’obligation d’aller s’en occuper, des habits plus décontractés…les applaudissements à 20h…plein d’excuses « humaines » en fait. Et maintenant ?

Va-t-il y avoir une acceptation diminuant de l’imperfection ou bien certains vont-ils réussir à bâtir sur cette imperfection pour conserver une échelle humaine ?

 

Bon enfin, j’aurais certainement d’autres points à poser par écrit, mais on est déjà demain, et moi j’ai prit mon petit rythme… Et puis demain « j’ai des choses à faire », enfin je veux dire, je vais devoir me mouvoir géographiquement en accord avec mon inscription temporelle, et ça, j’ai perdu l’habitude… alors il va me falloir un bon dodo. Bonnuit ! et prenez soin de vous…

 

 

 

 

 

Lundi 11 mai 2020, j’ai le droit de sortir mais j’ai peur. Peur ? Peur de quoi ? Ca n’est pas réellement de la peur, mais plutôt de l’immobilisme. Je suis saisi sur place. Saisi par les pours et les contres, les nouveaux questionnements, les craintes, cherchant les envies…

La pluie à l’extérieur me facilite la décision de rester confiné cette « première » matinée. Ma copine me demandais hier: « Et demain, tu vas faire quoi ? ». Je lui ai répondu « Comme chaque jour… ». Elle avait l’air d’avoir du mal à comprendre. Je n’avais pas envie de remettre en question mon fonctionnement au moment de la discussion. Je digère… En effet ces dernières semaines j’ai pris l’habitude de venir travailler dans ce petit appartement sur les toits marseillais que je sous-loue pour l’occasion. Je vais d’ailleurs aussi devoir le quitter…

Alors après avoir rangé les débords de notre week-end décontracté, après avoir regardé si « l’univers extérieur m’appelait » sur les réseaux sociaux, je me suis penché sur le ballon en cuir finalisé ce week-end. J’en suis fier. Content d’avoir prit le temps, dépasser les difficultés, et donné forme à un objet qui reste beau même si devenu habituel. Le pouvoir du motif sur la matière. Comme souvent après avoir achevé un objet, j’ai envie de le voir, de le tenir dans mes mains. Alors du même fait je me questionne sur l’intérêt d’avoir fait cela.

Mettre le cadre nous même

Prendre en charge le danger/charge mentale

Injonction paradoxale: consommez, même si l’on sent que cette crise est due à ce comportement

 

 

 

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